5 raisons pour reporter le Festival Amani à Goma, selon Arsene Tungali

27 août 2013

5 raisons pour reporter le Festival Amani à Goma, selon Arsene Tungali

Festival Amani, Festival pour la Paix a Goma.

Mardi 27 Aout 2013

10h00 : Je suis au Campus (à mon Université) en train d’attendre mon dernier examen pour la session. J’entretiens une conversation nourrie avec mon ami « J » qui est dans l’organisation (d’une certaine façon) du Festival Amani, ce festival qui fait beaucoup de bruits et qui est prévu débuter à Goma le 30 et 31 Août pour finir le 1er septembre.

Avec mon ami J, on discute un tout peu sur la faisabilité du Festival à Goma et au bout de quelques minutes, on essaie d’avancer des raisons qui soutiennent qu’il soit reporté à une date ultérieure.

13h30 : Mon examen prend fin. Je me dirige vers le centre-ville car je devais écrire ce blog et le mettre en ligne avant la fin de la journée.

13h40 : J’entre dans un café quelque part dans la ville  pour prendre un déjeuner et à la porte, je suis face à Guillaume Bisimwa, le responsable (à défaut, l’un des responsables !) du Centre Culturel des Jeunes de Goma, connu sous le nom de Maison des Jeunes. C’est l’un des organisateurs du Festival Amani. Une coïncidence ! Alors que j’ai les idées bouillonnantes dans mon esprit.

Avec Guillaume, on s’est déjà rencontré à plusieurs reprises. Je l’ai connu pour la première fois lorsque j’ai organisé une conférence dans la salle de la Maisons des Jeunes et il avait été très gentil en me la donnant gratuitement. Je le remercie en passant. Aujourd’hui, on échange juste un coucou et il va s’asseoir sur une table avec d’autres gens. Lorsque je prends place à la table d’à cote, je remarque dans le groupe, Mr Eric de Lamote, le Belge, promoteur du Festival Amani. Je reconnais les autres personnes autour de la table par leurs t-shirts avec les logos du Festival et je me dis, c’est donc l’équipe !

Quelle coïncidence ?

Dans ce café, on m’informe qu’il n’y a pas Internet. Directement, je me décide de quitter pour un autre endroit car mon plan était de prendre mon déjeuner et en même temps taper ce texte sur mon pc et ainsi, gagner le temps avant que quelqu’un d’autre ne me prenne pour un autre rendez-vous.

Il y a quelques jours…

… Je félicitais les organisateurs du Festival Amani, non pas parce qu’ils m’avaient invité dans la première réunion qu’ils avaient organisée avec quelques ONGs de la place (pour ne plus m’inviter la prochaine fois, malheureusement !), mais je me disais que ça tombe bien !

C’est le bon moment de parler de la paix et d’organiser ce grand rassemblement où les jeunes de la ville de Goma et environs pourront oublier un tout petit peu les affres de la guerre et se réunir autour des grands musiciens dont Youssouffa, Freddy Massamba, Lexxus Legal, etc qui étaient à l’affiche. Bien entendu, d’autres activités étaient prévues !

Ce Festival a son sens d’être car c’est le bon moment et pas un autre jour ou une autre période. J’en étais convaincu et je suivais toute l’évolution sur les médias sociaux.

Et depuis ce matin…

Après la conversation avec mon ami J, je commençais à voir autre chose et quelques idées me passaient par la tête et j’ai dû conclure en disant qu’il faut que ce Festival soit reporté à une autre date, le temps que ce qu’il y a passe et ainsi, nos cœurs seront disponibles à célébrer la « paix à venir dans la ville de Goma et dans toute la région. »

Ainsi, en tant que Congolais, habitant de Goma, jeune activiste, humanitaire, grand et/ou petit frère à quelqu’un, je me permets de partager ces quelques idées et je crois que j’en ai le droit car je suis aussi bloggeur !

Voici quelques raisons qui me poussent à arguer que le Festival Amani tant attendu devrait être reporté à une date ultérieure.

1.       Le récent développement de l’actualité à Goma

Si vous étés à Goma, vous savez très bien ce que ça signifie. Si vous êtes à l’extérieur, vous le savez également car toute l’actualité est partagée sur Internet. Je ne voudrai pas vous rappeler que depuis la semaine passée, les affrontements ont repris dans la partie Nord de la ville de Goma. Pire encore, le weekend passé, des bombes sont tombées sur la ville visant les populations paisibles. Le gouvernement Congolais confirmé que certains de ces bombardements venaient du Rwanda, le pays voisin et d’autres des rebelles du M23 qui se battent contre les FARDC. Le Rwanda à son tout a ses propres déclarations quant à ce.

A mon avis, avant que les choses ne soient claires, le Festival ferait mieux d’attendre.

2.       La taille des participants attendus

Lors de la première réunion à laquelle j’ai eu le privilège de participer en tant que Directeur Exécutif de l’ONG Rudi International, le Promoteur du Festival avait dit que pour les 3 journées, à peu près 4500 participants étaient attendus, en raison de 1500 par jour. Regardez, les bombardements du weekend passé sur la ville ont atteint (tué) près de 10 personnes sans compter les dommages matériels. Ces personnes étaient éparpillées !

Le Festival, réunissant 1500 personnes à un seul endroit et au même moment, pourrait constituer un vrai abattoir une fois le malin décidait d’en profiter pour faire valoir son point de vue. A mon avis, en tant que frère à quelqu’un, je ne serai pas d’accord que des gens soient réunis à une telle masse à un seul endroit pour qu’enfin, le pire (l’imprévisible !) puisse arriver.

3.       L’âge des participants ciblés

Ce matin, au Campus du Lac, la Ministre Nationale du Genre, Geneviève Inagosi était en train de s’entretenir avec les étudiants et parmi les choses qu’elle a rappelée à l’assemblée, elle a dit : « les jeunes sont l’avenir de la RDC, le pays a besoin de chacun d’entre eux pour son essor. »

Le Festival vise en majorité les jeunes ! A mon avis, sans faire trop de statistiques ou sans consulter les organisateurs, l’âge varierait entre 11 et 25 ans. Si le malin voudrait bien agir, je ne souhaiterai pas que des jeunes comme moi, 1500 réunis puissent perdre leur vie d’un seul coup. Le dimanche passé, les victimes de ces bombardements ont été enterrées et j’ai suivi sur une chaine locale comment leurs membres de leurs famille pleuraient avec amertume. Ils étaient environs 10 (je dirai, seulement !)

Imaginez-vous ce que ça ferai si seulement le pire arrivait. Je suis pessimiste pour ce cas-ci. Merci de me le concéder !

4.       Le risque que le Festival tourne en une révolution

Si vous êtes à Goma, vous pouvez sentir combien les jeunes sont révoltés par rapport à tout ce qui se passe. Plusieurs manifestations ont été enregistrées les dernières semaines. La plupart d’entre elles ont été mâtées par les forces de l’ordre et la plus grande manifestation n’a pas dépassé 200 personnes y participants vivement.

La fureur qu’ont ces jeunes, il suffit qu’ils se retrouvent réunis à un seul endroit quoi que ce soit pour un objectif de paix et qu’il y ait un incident pour qu’ils se soulèvent et fassent l’imprévisible. Le lieu où se tiendront les activités du Festival est presque fermé et donc, les services de l’ordre auraient du mal à contenir cette masse. S’il arrivait que ces manifestants se décident de ne pas quitter en présentant une exigence, je ne connais personne qui puisse les contrer à quitter.

Et cet endroit deviendrait la Place Tahrir. Je ne le prévois pas, mais à mon avis, le Festival devrait être reporté et laisser que la tenson se calme un tout petit peu et que les tensions des populations soient apaisées par une solution au problème actuel.

5.       Les autorités (certaines)  risquent de ne pas participer à ce Festival

Alors que le message du Festival concerne la population de Goma, elle concerne les autorités également. Et à mon avis, quelques autorités étaient déjà invitées, si pas la Première Dame de la RDC, Mme Olive Lembe Kabila qui en est la marraine (selon ce que j’entends dans les rues).

Avec toute l’actualité qu’il y a actuellement, je doute fort que toutes les autorités invitées se présentent. Ils présenteront des excuses que les organisateurs devront accepter. Ainsi, l’objectif que j’assigne à ce Festival ne sera pas atteint. Les organisateurs peuvent se dire que le leur est atteint, tant pis. En fait, c’est eux les organisateurs.

Conclusion

Je rappelle que je me permets de faire ces lignes, juste en tant qu’habitant de Goma et un potentiel participant au Festival. J’avais déjà prévu d’acheter mon billet pour le dernier jour, le dimanche 1er Septembre, mais je ne pense plus y aller si le Festival venait à être organisé aux mêmes dates prévues et pendant que la ville est toujours sous tension.

Je voudrai m’adresser aux organisateurs du Festival Amani : Serez-vous en mesure d’endosser cette responsabilité, de porter sur vos têtes toutes ces victimes, si le pire devait arriver ? Qu’avez-vous à perdre en acceptant de reporter le Festival ? Peut-être les hôtels déjà réservés pour les invités VIP, les billets d’avion déjà réservés, les affiches, le temps, de l’agent ?

Mais à mon avis, je n’ai fait que partager avec tout le monde mes craintes par rapport à l’organisation du Festival comme prévu. Par contre, vous avez tout à gagner !

A mes lecteurs,

Qu’en pensez-vous? Surement vous en avez d’autres à rajouter sur la liste ou bien vous avez des avis contraires. Je voudrai bien vous lire en commentaires à ce blog. Je suis disposé à discuter, mais s’il vous plait, veuillez partager ce message à vos amis, frères et connaissances.

Ne dites pas que « Arsene haku bambiyaka ! »

PS : Je n’ai pas eu assez de temps pour relire mon texte selon que les règles me le demandent, veuillez bien être indulgent s’il arrivait qu’il y ait des coquilles ou bien que je sois vague dans mes propos. Désolé aussi pour la longueur de ce port !

Parce que Tungali Goma !

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Commentaires

Tungali
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Le Festival avait bel et bien ete reportee et a eu lieu plutot en 2014 ( 14-15-16 February 2014). Lire ce communiquee: https://www.amanifestival.com/download/archives/2013/CP2013_01_Presse.pdf?version=v2019.02.07

Lire cet article: https://www.theguardian.com/world/2014/feb/16/democratic-republic-congo-music-festival

Rachel AMANI
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Je viens de tout lire. Réellement ça se rapporte aux polémiques de ces jours vis-à-vis du festival amani.

Il ya à boire et à manger dans cette affaire. Perso,je trouve que les intérêts cachés des organisateurs priment surceux des bénéficiaires...